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Sainte Julienne de Cornillon

En bref

Sainte Julienne de Cornillon (ou Julienne du Mont-Cornillon), née en 1192 ou 1193 à Retinne, près de Liège et décédée le 5 avril 1258, à Fosses-la-Ville (Belgique), était une religieuse augustinienne, et prieure du couvent-léproserie du Mont-Cornillon, dans la principauté de Liège. Elle est surtout connue pour avoir obtenu de l’évêque de Liège (en 1246) puis du pape Urbain IV (en 1264) l’institution de la Fête-Dieu.

Une jeunesse orpheline et érudite

Née à Retinne, village près de Fléron, Liège (Belgique), elle perd ses parents Henri et Frescende, riches agriculteurs, à l’âge de 5 ans. Elle fut confiée, avec sa sœur Agnès, au couvent des sœurs augustiniennes du mont Cornillon à Liège, pour y être élevée par les sœurs. Le couvent dirigeait une léproserie.

À 14 ans, Julienne fut admise au nombre des sœurs. Elle étudia le latin, le français, ce qui lui permit de lire les Pères de l’Église, tels que saint Augustin et saint Bernard. Julienne aimait particulièrement ce dernier saint, dont elle connaissait par cœur des sermons entiers. Elle vivait à la boverie, ferme du couvent situé près de l’actuelle église saint-Remacle.

Une expérience mystique

Dès son adolescence, elle était particulièrement portée vers la dévotion eucharistique. À partir de 1208, elle eut de fréquentes visions mystiques, dont une revint à de multiples reprises, dans laquelle elle vit une lune échancrée, c’est-à-dire rayonnante de lumière, mais incomplète, une fraction manquante. Elle resta longtemps sans comprendre la signification de cette vision, et sans en parler à personne.

En 1222, Julienne fut élue prieure du monastère de Cornillon. Elle subit en tant que prieure de nombreux tourments, certains dus à des membres de sa communauté et d’autres dus à des bourgeois de Liège souhaitant augmenter leur pouvoir sur la léproserie et en accaparer les revenus.

Cependant, la vision étrange continuait de tourmenter Julienne. Après des années, c’est – selon la Vita – le Christ même qui lui donna les lumières nécessaires à la compréhension de cette vision. Comme le rappela alors Benoît XVI lors de l’audience générale du 17 novembre 2010 place saint-Pierre: « Le Christ lui révéla la signification de ce qui lui était apparu. La lune symbolisait la vie de l’Église sur terre, la fraction manquante représentait en revanche l’absence d’une fête liturgique, pour l’institution de laquelle il était demandé à Julienne de se prodiguer de façon efficace. » La vita de sainte Julienne écrite seulement six années après sa mort, précise : « Sa volonté, en effet, était que, pour l’augmentation de la foi, qui devait s’affaiblir à la fin du siècle, et pour le progrès et la grâce des élus, l’institution du Sacrement de son Corps et de son Sang fût célébrée une fois par an plus solennellement et plus spécialement que lors de la Cène du Seigneur, quand l’Église est généralement occupée au lavement des pieds et à la mémoire de sa passion. » Julienne, croyant d’abord se dérober, accepta finalement sa mission et se mit à œuvrer pour l’établissement de cette fête. La première personne à qui elle osa parler de son projet fut la Bienheureuse Ève de Liège, recluse de saint-Martin.

La première Fête-Dieu

Julienne participa très probablement à la composition de l’office, les paroles comme la musique, même si on attribue généralement celui-ci à Jean de Cornillon. Les deux amies entreprirent des démarches pour l’instauration de la Fête-Dieu, demandant conseil à quelques éminentes autorités ecclésiastiques, tels que Jean de Lausanne, chanoine de Saint-Martin, Jacques Pantaléon, archidiacre de Liège et futur Pape Urbain IV, Guy, évêque de Cambrai, et aussi de brillants théologiens dominicains, dont Hugues de Saint Cher, et bien d’autres. Le prince-évêque Robert de Thourotte s’intéressa à cette proposition et s’engagea à officialiser le culte eucharistique. Tombé malade à Fosses, craignant de n’avoir pas le temps de confirmer la fête à sa principauté; il recommanda l’institution de la fête au clergé qui l’entourait et en fit célébrer l’office en sa présence, à Fosses même. Il y mourut, le 16 octobre 1246, sans avoir pu tenir un synode général et y publier son mandement.

L’universalisation de la Fête-Dieu

Des bourgeois de Liège s’opposaient à la fête car cela signifiait un jour de congé en plus pour la population et certains religieux considéraient que cette fête ne méritait de telles dépenses. L’opposition à la fête devint plus forte après la mort de son protecteur l’évêque Robert. L’opposition devenant persécution, Julienne et quelques compagnes quittèrent leur couvent. Elles trouvèrent asile en plusieurs abbayes cisterciennes, passant par le Val Benoît et Huy. Elles furent accueillies finalement à l’Abbaye de Salzinnes, près de Namur, qui, se trouvant hors de la Principauté de Liège, devint leur refuge permanent.

Elle mourut le 5 avril 1258 à Fosses-la-Ville, dans l’Entre-Sambre-et-Meuse (Belgique), et fut inhumée dans l’abbaye cistercienne de Villers-La-Ville. Elle y fut vénérée, aux côtés des cinq bienheureux de cette abbaye, dont Gobert d’Aspremont.

Après la mort de son amie, Eve continua cependant les démarches, et obtint l’institution de la fête pour l’Église universelle grâce à sa bonne relation avec Jacques Pantaléon. C’est ainsi que Jacques Pantaléon de Troyes, archidiacre de Liège devenu pape sous le nom de Urbain IV institua la Fête Dieu, Corpus Domini pour l’Église universelle par la bulle Transiturus de hoc mundo le 11 août 1264 à Orvieto, Siège Apostolique et résidence du pontife et de sa cour.

La Fête-Dieu ne fut reçue dans l’ensemble de l’Église latine qu’au temps de Clément V, à l’époque du concile œcuménique de Vienne 1311 où il renouvela la constitution d’Urbain IV.

L’office célébré à Liège en 1246, a désormais laissé la place à un office composé par Thomas d’Aquin, doctor angelicus, lui aussi à Orvieto dans le couvent de Saint-Dominique. Cet office est christocentrique et communautaire, et il contient des hymnes encore fort populaires aujourd’hui comme « Tantum Ergo » ou « Panis Angelicum ».

Canonisation et vénération

Sainte Julienne est célébrée liturgiquement le 5 avril, en Belgique, et plus solennellement le 7 août dans le diocèse de Liège. Elle est souvent représentée avec une lune échancrée ou un ostensoir.